Cet article a été initialement publié sur Corporate Knights
Certaines choses m’empêchent de dormir la nuit, mais en tête de liste se trouve l’impact de la pandémie de COVID-19 sur les jeunes, en particulier les jeunes femmes.
Il y a un ensemble de preuves accablantes qui démontrent que les femmes ont été les plus touchées par la pandémie, qu’il s’agisse de pertes d’emplois sans précédent, de l’impact de l’augmentation des soins non rémunérés ou de l’augmentation dévastatrice de la violence fondée sur le genre dans tout le pays. Comme l’a dit l’économiste Armine Yalnizyan, titulaire de la bourse Atkinson sur l’avenir des travailleur·euse·s, la « Récession des femmes » a été implacable et a inversé des décennies de gains durement acquis pour faire progresser l’égalité des genres sur le lieu de travail.
Les jeunes ont également été confronté·e·s à des impacts disproportionnés en raison de la pandémie de COVID-19. La jeunesse milléniale et les membres de la génération Z ont dû faire face à des perturbations dans leur scolarité, ont souvent été les premiers travailleur·euse·s licencié·e·s en raison des fermetures induites par la COVID, ont été lésé.e.s dans leurs revenus et connaissent des niveaux plus élevés d’anxiété, de dépression et d’isolement social.L’insécurité de l’emploi est en hausse et les jeunes ne savent pas trop où orienter leur carrière en cette période d’incertitude économique. Les conséquences économiques de leur départ du marché du travail, notamment la réduction des revenus au cours de la vie, l’atrophie des compétences et l’érosion des réseaux professionnels, pourraient se faire sentir jusque sur dix ans.
Ces facteurs sont encore aggravés pour les jeunes femmes, en particulier les femmes Noires, Autochtones et racialisées, les femmes en situation de handicap et les femmes nouvellement arrivées. Statistique Canada souligne que les jeunes femmes constituent le groupe démographique le plus éloigné des chiffres d’emploi antérieurs à la loi COVID-19. Un rapport des Services économiques de la RBC, rédigé par Dawn Desjardins et Carrie Freestone, a révélé que si les femmes de la génération Z ne représentent que 2,5 % de la population active du Canada, elles comptent pour 17 % des pertes d’emploi.
Par mon travail, mon bénévolat et ma participation à des programmes de mentorat, je parle chaque semaine à des jeunes de tout le pays. Ces jeunes partagent leurs espoirs, leurs craintes mais aussi leurs frustrations de ne pas voir leurs besoins pris en compte dans l’élaboration des politiques de lutte contre la pandémie. Je crains que si nous ne prenons pas les bonnes mesures dès maintenant, les jeunes ne deviennent une « génération Confinement » qui n’aura que des possibilités limitées de réaliser tout son potentiel.
Alors comment faire pour éviter que cela ne se produise ?
Tout d’abord, il faut reconnaître que toutes les affectations budgétaires doivent tenir compte de la dimension intergénérationnelle. Le prochain budget fédéral, prévu pour le 19 avril, offre une excellente occasion de mettre cela en pratique. Ce sera le premier budget du pays depuis plus de deux ans et le premier que la vice-première ministre Chrystia Freeland présentera dans son double rôle de ministre des Finances du Canada. J’espère que l’on continuera à mettre l’accent sur une approche féministe intersectionnelle du rétablissement, ainsi que sur une approche intergénérationnelle, comme l’ont demandé YWCA Canada et d’autres organisations.
Deuxièmement, nous devons nous attaquer à l’un des défis les plus urgents : la précarité de l’emploi. Nous savons que l’accès au marché du travail en période de crise économique est difficile pour tout le monde, mais surtout pour les personnes disposant d’un faible capital social, comme les jeunes. Nous devrions envisager de mettre en œuvre des mesures politiques telles qu’une garantie d’emploi pour les jeunes, semblable à ce qui existe dans l’Union européenne : dans les quatre mois qui suivent la fin des études ou le début du chômage, chaque jeune de moins de 30 ans est assuré d’avoir un emploi de bonne qualité, de poursuivre ses études ou de suivre une formation gratuite.
Cela pourrait s’appuyer sur les investissements du gouvernement fédéral dans la Stratégie pour l’emploi et les compétences des jeunes. Cela sera vital pour les jeunes qui ne sont ni employé·e·s, ni étudiant·e·s, ni en formation (NEEF) (NEET en anglais). Au cours de la pandémie, le nombre de jeunes NEEF a atteint des niveaux sans précédent – actuellement un.e jeune sur quatre au Canada.
Enfin, au-delà du lieu de travail, nous avons besoin que le budget 2021 comprenne des solutions ciblées pour s’attaquer aux autres problèmes qui touchent les jeunes de manière disproportionnée, notamment la crise de santé mentale induite par la pandémie, l’insécurité du logement, le fardeau stupéfiant des frais de scolarité et de la dette de l’enseignement postsecondaire, ainsi que la fracture numérique qui fait que tout le monde a des défis de connexion en ligne.